Rapport Antares: pour une réforme rapide et choc du financement des hôpitaux!

May 4, 2021 time to read 4 min read

Comment améliorer durablement et efficacement le financement des hôpitaux en Belgique ? Fin mars, un rapport a été présenté au cours d’un webinaire par Antares Consulting, l’Absym et l’ABDH afin de dégager des pistes et 3 chantiers importants en comparant ce qui se passe notamment dans d’autres pays.

Plusieurs intervenants ont participé aux débats sur ce rapport: Paul d’Otreppe (président de l’Association belge des Directeurs d’hôpitaux [ABDH]), le Dr Gilbert Bejjani (secrétaire Général de l’Absym), le Dr Philippe Devos (président de l’Absym), Eric Christiaens (administrateur délégué de l’AZ Vesalius de Tongeren), Eduard Portella et Marc Van Uytven (président et directeur d’Antares), Peter Fontaine (directeur général des cliniques de l’Europe), Katrien Bervoets (présidente a.i. de la Vlaamse Vereniging Hoofdartsen)

Un modèle de financement
Pour Eduard Portella, un   “plan choc”   devrait être mis en place en Belgique pour rattraper le retard et définir un nouveau modèle de financement step by step.   “La Belgique est aujourd’hui dans une situation où l’écart entre la complexité des modalités de financement actuelles et les attentes du système oblige à faire un bond en avant, et non pas un demi-pas. Pour cela, elle a la chance de pouvoir capitaliser sur les expériences internationales, non pas pour répliquer leur système, mais plutôt pour s’en inspirer, afin notamment d’éviter les écueils dans lesquels ces expériences passées ont pu tomber.”   Pour lui,   “le passage à un système all-in DRG (Diagnosis Related Groups) doit être une priorité, tout en initiant parallèlement des projets pilotes avec de nouvelles modalités de financement du type bundled payments*  .”

Trois chantiers
Pour sa part, Marc Van Uytven évoque une approche basée sur 3 importants chantiers devant permettre une implantation rapide:   “Il faut développer le financement basé réellement sur les DRG, comme socle de base pour les futurs bundle payments.* Cette implantation se fera à partir d’un shadow system qui devrait permettre l’adaptation progressive des institutions. Il faut préparer les éléments nécessaires pour construire et implanter progressivement les bundled payments. Enfin, il faut adapter la régulation (orientée vers les outcomes plutôt que vers les structures), les outils et les compétences de tous les acteurs du système de santé…

Autant d’évolutions qui, pour lui, peuvent se faire rapidement:   “Un changement qui pourrait se réaliser en moins de 6 ans!”   Il ajoute:   “Au moment de discuter le modèle de financement hospitalier, il faudra également réfléchir à son alignement avec le système de rémunération des professionnels. Les deux systèmes devraient être clairement séparés, mais avec un alignement fort dans les objectifs et la logique sur lesquels ils seront basés. Le système actuel, uniquement orienté vers la réalisation d’actes, conduit à une rémunération des professionnels orientée vers le volume.

Philippe Devos attentif à certains points
Pour Philippe Devos, le président de l’Absym,   “un financement prospectif plutôt que rétrospectif est l’avenir. Les médecins doivent se rendre compte qu’il faut changer le système. On ne peut pas continuer à optimiser les vieilles recettes (toujours plus avec autant)” . Il reste toutefois  “mitigé sur le fait qu’un seul organisme (proposition du rapport) distribue l’argent à tout le monde. Cela va à l’encontre de l’esprit libéral de notre profession. C’est aussi dangereux de concentrer le pouvoir dans une seule main“. Par contre, il est favorable au fait de copier ce qui fonctionne chez les voisins:   “Cela va nous faire gagner 5 ans.”   Pour lui, il est prioritaire «d’avoir une marge pour innover “.

Il émet aussi une autre réserve:  “Si l’on est obligé de faire une garde et que rien ne se passe la nuit, il faut quand même financer ce travail, or le rapport ne le prévoit pas. Les bundled payments ne le prévoient pas, et il faut donc une réforme plus large. Si l’on fait une réforme, elle doit être accomplie partout en même temps. Il ne faut pas qu’on enlève des actes qualitatifs pour le patient pour dégager des moyens pour des robots. Il ne faut pas aller dans l’excès inverse.

Une période transitoire
Pour Eric Christiaens, administrateur délégué de l’AZ Vesalius de Tongeren,  “il faut donc une période de transition pour que l’on ait le temps de réformer le système. Dans cette période transitoire, personne ne peut être pénalisé “. Il rappelle aussi qu’actuellement   “le financement pour les réseaux n’est pas clair du tout. Il faut donc du changement aussi à ce niveau“.

Peter Fontaine, directeur général des Cliniques de l’Europe, est intéressé par le contenu de ce rapport, mais il souligne qu’il   “existe un transfert de risque vers les prestataires” . Il attire l’attention sur   “la gestion du personnel ambulatoire”  si une telle réforme devait être mise en place. Pour lui toutefois,  “les changements peuvent toujours entraîner des risques, mais le plus grand risque est de ne rien faire. Aujourd’hui, il y a une base pour tenter quelque chose. Il faut arrêter les petites réformes. C’est le moment unique pour agir. Il faut un changement, sinon le système sera ingérable.”

Non au datadiabolisme
De son côté, Paul d’Otreppe, l’un des instigateurs du rapport, a condamné ce qu’il appelle “le datadiabolisme en Belgique, alors que les datas peuvent être utiles à la gestion des dépenses des soins de santé“. Tout en ajoutant que le projet ne veut pas réduire «les médecins à des employés. Il s’agit de véritables entrepreneurs. Les médecins doivent rester les patrons de leur pratique médicale”. Pour lui,  “la responsabilisation est une liberté d’action pour les directeurs d’hôpitaux”. (Voir également son interview vidéo)

Enfin, Gilbert Bejjani, un autre instigateur de cette démarche, a tenu à conclure en rappelant qu’il faut respecter tous les acteurs: «Il ne faut évidemment pas appauvrir le système. Toute cette réforme ne peut pas être mise en place de façon brutale.”  

* Le paiement groupé (bundled payments) est le remboursement des prestataires de soins de santé  “sur la base des coûts prévus pour les épisodes de soins définis en clinique”. Il a été décrit comme un  “juste milieu”  entre le remboursement à l’acte et la capitation, étant donné que le risque est partagé entre le payeur et le prestataire. Wikipédia (anglais)

Le résumé du Rapport Antares
L’intégralité du Rapport Antares

Regardez ici le webinar sur le Rapport Antares.

Ce numéro a été réalisé grâce au support de MSD.
Son contenu reflète l’opinion des auteurs mais pas nécessairement celle de MSD.

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